vendredi 26 novembre 2010

ENQUÊTER À DISTANCE

Depuis la rentrée, je travaille en résidence de collectage.
Rochefort, Cergy, Aubusson, Thionville, Niort.
À distance de la Picardie donc.
Bizarre.
On dirait que je reconstitue l’enquête.
À ma façon.
À distance.
Je rencontre gendarmes, avocats, policiers, détenus, experts, criminologue et avec eux, point par point, je fabrique l’enquête, je la fantasme, l’imagine…

GENDARMES.
Tenez, par exemple, avec les gendarmes, ceux de l’école de gendarmerie de Rochefort, je leur ai dit tout ce que je savais, et nous avons reconstitué pendant 2h00, l’enquête, pas à pas… on a reconstitué son arrestation… j’avais l’impression d’y être encore plus que si j’y étais vraiment.

PRISON.
Tenez, encore, maison d’arrêt du Val d’Oise, Maison d’arrêt de Rochefort, centre de réinsertion de l’île de Ré. Je refais le parcours de celui qu’on écroue, tout au début, l’arrivée. Visite de cellule. Le directeur de la prison. La cantine. Le parloir. La vie au quotidien. La cellule qui devient presque un espace privé. La cour de promenade. Les regards agacés, interrogatifs, curieux. On se croirait dans Un Prophète.



TRIBUNAL.
L’avocat de Jacques B est mort, très bien.
J’irais chez un avocat, à Guéret, à Rochefort.
Au tribunal, aux assises de Niort, Saintes et Thionville.
Y passer des journées encore.
Comme un accroc au faits divers.
Tiens, là, un avocat m’a repéré. Juste avant les plaidoiries, il vient vers moi. Me demande ? j’explique. Il parle. Pas besoin de le pousser beaucoup. Il ressemble à Jean-François Balmer. Il a eu l’air avachi pendant tout le procès. Je lui pose la question.

— c’est normal, je fais semblant, il faut que les jurés sentent que je m’en fout. Je m’en fout. Mais, là, ils vont entende ma voix, pour la première fois. Écoutez, ça devrait vous plaire, je vais leur montrer mon paysage.
Je dois avouer. Oui, ça m’a plu. Mais le type a pris 8 ans. Une année de plus que ce que demandait l’avocat général. Brillant mais loupé. C’est gris, tout est gris. Je veux dire, les coupables comme les victimes, il y a des tas de choses à soulever…

Et moi, pendant ce temps, je reconstitue l’enquête.




PARTIR.
Mais je sens bien au fond de moi, qu’il va falloir que j’y retourne. En Picardie. Sur ses traces. Il me manque quelque chose. Il faut que j’aille voir tout cela de plus près…

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